retour au château

Maol avait pu rentrer à sa demeure. Il lui tardait de retrouver sa cuisine, puis sa chambre. Cette sorti, que ses sœurs lui avaient imposé, l’avait épuisé. Elle serait donc considérée comme étant la seule de ce mois-ci.
Le jeune homme traîna ses pieds jusqu’à la cuisine, où il se laissa tomber mollement sur une chaise. Sa main, qui renfermait comme à son habitude sa tasse de thé, la déposa sur la table.
Une servante au teint maladif et à la chevelure couleur ténèbre vint et le servit. Maol prit sa tasse, nouvellement remplit, et la porta jusqu’à ses lèvres.
Il tourna la tête en direction de la porte. Il commençait à se questionner sur la présence des autres en cette demeure. Il supposa être seul, étant donné qu’il avait mener ses sœurs jusqu’à l’île aux pirates, et qu’elle n’étaient point de retour, et qu’Orgar lui avait confier son intention de faire une visite personnelle et qu’il ne semblait point l’avoir finit.
La présence des autres avait pour habitude de la fatiguer encore plus rapidement qu’à son ordinaire. Il ne se plaignit donc point de se retrouver seul pour quelques instants.

Invité

Cela faisait maintenant des heures que Karl déambulait dans la forteresse, le silence sépulcral des lieux seulement troublé par le bruit de ses bottes martelant le sol dallé. Il avait l'habitude d'écumer ces corridors, mais en l'absence de celui qu'il considérait comme son maître le Château de l'Obscurité lui semblait décidément une trop vaste demeure. Et ce n'était pas les quelques allers et venues des serviteurs au teint cendreux qui risquaient de le distraire, d'autant que faire la conversation aux autres résidents n'avait pas l'air de faire partie de leurs prérogatives. Mais Karl n'allait pas les blâmer, il appartenait lui aussi à cette caste d'ombres dont la seule motivation dans la vie était de servir les puissants. Où étaient-ils d'ailleurs tous passés ?

Perdu dans ses sombres pensées, il descendit les marches qui menaient au sous-sol et franchit sans s'en rendre compte le seuil de la cuisine, se retrouvant presque nez à nez avec Maol. La Paresse incarnée, qui n'éveillait qu'incompréhension et une pointe d'irritation chez Karl : Comment un être investi d'une telle puissance pouvait-il somnoler à longueur de journée et gâcher ainsi une existence hors normes ? Encore un mystère du destin.

« Mes hommages, Seigneur Maol. Je ne m'attendais pas à vous trouver ici, veuillez excuser mon intrusion... »

Sur le point de tourner les talons, Karl se ravisa et risqua d'une voix hésitante :
« Savez-vous quand le Seigneur Orgar a prévu de rentrer de son expédition ? »

Le visage dirigé en direction de sa tasse, Maol se posait la très existentielle question de savoir s’il allait reprendre ou non du thé. Ce fut à cet instant que Karl Prosper ouvrit la porte. Lentement, le jeune homme délaissa son objet fétiche des yeux pour les poser sur le jeune homme qui venait de faire son entrée. Un mince mouvement de lèvres vint dessiner un vague sourire sur son visage. Sa main posa délicatement la tasse sur la table en pierre se trouvant devant lui.

« Bonjour Karl. »

Maol attendit quelques instants, puis sa voix calme et berçante sortit de nouveau hors de sa bouche.

« Tu n’as pas à t’excuser. Ce lieu est disponible à tous. »

Son regard ne cessait d’observer ce jeune guerrier. Celui-ci s’apprêtait à sortir de la cuisine lorsqu’une dernière question survint.

« Mon frère… non je ne le sais pas. »

Encore une fois un laps de temps s’écoula avant qu’il ne reprenne la parole.

« Mais il a dit qu’il t’avait laissé une tache à effectuer avant son retour. »

Avant d’en dire plus, il mena sa tasse à ses lèvres et bu la dernière goutte qui y restait.

« Il semblerait qu’il soit partit en chasse, pour amener en ces lieux des objets pour le sacrifice. Il les a laissé bâillonnés et attachés dans un coin de la coure intérieur. Il compte sur toi pour les mettre en cellule, sans trop amocher. »

Maol déposa de nouveau la tasse devant lui.

« Il t’expliquera ton futur rôle lors de son retour, qui ne devrait pas tarder, je pense. »

Invité

Karl assimila ces informations, les sourcils légèrement froncés. L'exposé de sa mission, de la bouche de Maol, avait largement de quoi piquer sa curiosité, et le devoir passant avant tout, il se décida à accomplir ce qu'on attendait de lui dans les plus brefs délais. Le regard plongé dans celui de Maol, il consentit à un bref hochement de tête en signe d'acquièscement.
« Je vais m'occuper dès maintenant de ces... objets. Le Seigneur Orgar ne sera pas déçu. »

Après avoir salué comme il se devait son interlocuteur, Karl se dirigea vers la sortie, le sang bouillonnant à ses tempes. Alors qu'il grimpait les marches, sa main se referma machinalement sur la garde de son épée, ceinte à sa taille.

Sa visite au royaume maudit était à présent terminée depuis plusieurs heures, cependant son travail ne faisait que commencer. Certaines taches d’une importance sans pareilles devaient être rapidement accomplies avant que les sept lunes ne passent.
Le cerbère s’arrêta devant le pont-levis, attendant que celui-ci s’abaisse. Puis il s’introduisit dans l’immense coure intérieure. Orgar descendit de sa monture. Des serviteurs vinrent s’occuper d’elle, alors que son maître se dirigea vers ses appartements. En passant il put remarquer que le tas d’offrandes avait disparu et que la porte menant aux cachots était gardée. Un sourire de satisfaction se dessina sur son visage.
Orgar monta rapidement les escaliers menant à ses appartements. Il ouvrit la porte et entra dans une pièce semblable à un salon. Un serviteur vint s’assurer de la bonne santé du maître des lieux, mais Orgar rejeta toute discussion d’un geste dédaigneux du bras.

« Appel Karl, je dois lui parler. »

Ce fut les seuls mots qu’il prononça. Le serviteur partit laissant l’Orgueil dans sa chambre. Il s’assit d’un air las sur l’imposant trône, sculpté de gargouilles et des trois têtes de son cerbère, se trouvant en face de la porte d’entrée.

Pendant ce temps le serviteur vint retrouver Karl et lui signala que le seigneur Orgar était de retour et qu’il souhaitait un entretient avec lui.

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Quelques instants plus tard, des coups brefs retentirent à la porte des appartements d'Orgar et le serviteur annonça Karl. Celui-ci fit son entrée et exécuta une révérence appuyée, ainsi que le protocole l'exigeait. La nouvelle du retour de son maître avait été synonyme de soulagement, et la perspective de s'entretenir avec lui l'enchantait. Il avait pour habitude de boire chacune de ses paroles et d'appliquer à la lettre ses recommandations tant l'Orgueil lui paraissait supérieur au commun des mortels, l'égal même d'un dieu. Et aujourd'hui, installé sur son trône ouvragé, l'aura de puissance qui se dégageait de lui le désignait plus que jamais comme le champion incontesté de la cause du Mal.

« Seigneur, vous avez requis ma présence ? »

Orgar n’avait sentit que le mal qui émanait de Maol en arrivant, et non celui de ses sœurs. Alors qu’on s’en allait chercher Karl, Orgar usa de ses dons démoniaques pour retrouver la localisation de Gwenda et Una sur leur terre.
A cet instant Karl fit son entrée. Orgar se tenait droit, les yeux fermés et les mains se fermant sur les accoudoirs de son trône. Au dernier mot prononcé par le jeune homme, les paupières du maître de ces lieux se levèrent soudainement. Il était parvenu à les localiser.
Il aperçu Karl et son sourire fière reprit sa pace habituelle sur son visage. Orgar appréciait Karl car il était de ceux qui mettaient en avant sa supériorité.

« J’ai pu constater lors de mon arrivée que tu avais mené correctement la tache que t’avait confiée. Tout s’est passé comme il se doit ? »

Invité

Comme Karl s'y attendait, Orgar commença par s'enquérir de la tâche qu'il avait confié à son serviteur.
« Vos ordres ont été scrupuleusement respectés, Seigneur. Les offrandes n'attendent que votre bon vouloir dans les cachots. »

Ses traits se crispèrent néanmoins au souvenir de l'insubordination de l'orque.
« Un renégat a défié votre autorité, mais il aura tout le temps de repenser aux conséquences de son acte dans les ténèbres. Il a rejoint les prisonniers. »

Soucieux de ne pas s'attarder sur ce point, qu'il prenait comme un échec personnel, il enchaina.
« Votre voyage s'est déroulé sans encombres ? »

Orgar écouta avec une certaine satisfaction l’affirmation donnée par Karl de son travail bien accomplit. Il se leva, lui tourna le dos, les bras croisés dans celui-ci, son regard rivé sur la fenêtre. Ce fut à cet instant que le jeune homme l’informa d’un renégat qui avait osé braver son autorité et qui dès à présent se trouvait dans l’un des cachots.
Orgar ne dit rien pendant quelques minutes ne prenant pas la peine de répondre à la dernière question du jeune homme. Il revint sur le précédent sujet.

« Et tu l’as laissé là bas ? Ce n’est pas une façon de traiter l’un de mes hommes. »

Il se rendit vers la porte.

« Suis moi. »

Orgar se rendit dans la coure intérieure avec un air suffisent et fier gravé sur son visage. Il fit un vague signe à l'un de ses serviteurs, qui aussitôt vint rejoindre son maître qui lui glissa quelques consignes à voix basse. Le serviteur s'éclipsa et Orgar continua sa marche en direction de la sombre porte. Les gardes s'écartèrent, presque étonnés de constater que leur souverain descendait, l'air à l'aise dans ce lieu de ténèbres absolus.
Le jeune homme fit les quelques pas qui le menèrent jusqu'à la cellule de l'orque accusé. Autour de lui, dans les cachots, les prisonniers sentaient déjà que la noirceur des lieux aspirait la moindre notion d'espoir de leur esprit.
L'orque condamné fit un bond et se leva immédiatement à la vue d'Orgar, qui l'air fier dévisageait le fautif. Celui-ci se mit à s'étendre en excuses en tout genre afin de pouvoir donner une raison valable à son maître de sa conduite.
Orgar finit par sourire.

" C'est bon, je suis là pour te faire sortir. "

L''orque soupira de joie et de reconnaissance pour celui qui venait de le libérer. Orgar gagna la surface, suivi de l'orque. A peine fut il arrivé en haut que des gardes saisir le fautif et le jetèrent sur une table en bois et l'attachèrent. Le regard cruel d'Orgar se mit à pétiller de sadisme.
Les gardes amenèrent des scies et lentement coupèrent un à un les doigts, puis les mains, puis les pieds, puis les bras et jambes de l'orque coupable. Le rire inhumain d'Orgar ne fut pas assez puissant pour couvrire les hurlements de douleur de celui qui avait osé le défier. Une fois démembré, il fut empalé sur un pieu de taille immense placé au centre de la coure intérieure.
Orgar ne cessait de rire que pour ordonner que le corps reste exposé pendant un mois afin qu'il serve d'exemple. Un des gardes fit la remarque que le corps allait se décomposer et que l'odeur gênerait bientôt. Orgar parut réfléchir lors d'un instant. Il finit par poser une main amicale sur l'épaule de celui qui avait fait la remarque.

" Ne t'inquiète pas, je suis le maître de ces lieux, rien n'est impossible pour moi. Je vais arranger ça. "

Il fit signe à deux trolls de se saisir de l'impertinent qui avait osé faire ce commentaire. Il fut empalé, lui aussi, mais sur un pieu deux fois plus grand, afin qu'il ne fusse pas dérangé par les odeurs de décomposition de son camarade.

Orgar se tourna ensuite en direction de Karl.

" Apprends là une sérieuse leçon mon garçon. Oubli ce que t'on enseigné tes parents. On ne gagne pas le respect par des actes louables, mais par la peur ! "

Le jeune homme croisa ses mains dans son dos et regarda le résultat de ses interventions avec un certain plaisir.

" J'ai une nouvelle mission pour toi à présent. Je vais devoir m'entretenir avec mon frère et mes sœurs. Il faut que tu te rendes sur l'île aux pirates et que tu ramène Una et Gwenda. "

Invité

Karl sentit une goutte de sueur perler à sa tempe en entendant son maître déclarer que ce n'était pas une façon de traiter l'un de ses hommes. S'était-il montré trop sévère ? Après tout, l'endroit dans lequel il avait condamné le renégat à la solitude était empreint d'une noirceur presque palpable, et nulle personne n'en sortait indemne. Mais il avait jugé alors que c'était encore trop peu pour la pire faute qui soit entre ces murs : Contester l'autorité d'Orgar. Gagné par la nervosité, il n'avait rien osé rétorquer et s'était contenté de suivre son Seigneur quand celui-ci avait quitté ses appartements pour se diriger vers les cachots, allongeant le pas quand il le fallait pour rester dans l'ombre de l'Orgueil.

Malgré les années passées à cotoyer la souffrance, et en dépit des nombreuses séances de torture qu'il avait fait subir à des innocents, il resta blême et interdit devant le sort réservé à l'orque, et quelques minutes plus tard à l'un de ses infortunés semblables. La cruauté et l'intransigeance dont faisait preuve Orgar le fascinaient, mais une parcelle infime de son être fut retournée par ce spectacle. Il se maudit intérieurement d'une telle faiblesse et se promit de travailler encore et encore pour se hisser un jour à la cheville de son maître. S'il voulait être respecté, il devrait instaurer la peur chez ses subordonnés.

D'une voix presque désincarnée, il s'entendit dire :
« La leçon est comprise, Seigneur. »

A l'énoncé de sa nouvelle mission, il se frappa le coeur du poing.
« Votre verbe est mon ordre. J'y vais de ce pas. »

Après s'être incliné respectueusement, il s'éloigna, bien décidé à ne pas décevoir Orgar.

Orgar accorda un vague regard lorsque son sujet s’inclina devant lui avec la promesse de mener à bien cette nouvelle mission et qu’elle se solderait avec le retour des deux sœurs. Karl partit en direction du port et l’Orgueil regagna l’escalier qui le mènerait à ses appartements. Avant de partir il accorda un dernier coup d’œil à son œuvre sanglante et cruelle avec un sourire de satisfaction.
Il monta les escaliers et regagna ses appartements. En chemin il croisa l’un des serviteurs à qui il intima l’ordre d’amener ses deux sœurs, son frère et Karl une fois leur retour au château.

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